On ne m'enlèvera pas de l'esprit que 
                      l'objectif principal de cet album était d'en faire 
                      un formidable coup médiatico-marketing. Inviter Giraud 
                      à dessiner un album de XIII garantissait forcément 
                      l'intérêt des médias et agrandissait 
                      la cible marketing (les fans de Giraud venant gonfler les 
                      rangs des fans de XIII existants).
                    
Je sais pas vous, mais à imaginer un 
                      Largo Winch dessiné par quelqu'un d'autre que Francq 
                      ou un Astérix dessiné par quelqu'un d'autre 
                      qu'Uderzo (même si c'est Vance), 
                      je n'aurai probablement pas acheté... alors pourquoi 
                      sommes-nous si nombreux à nous ruer sur cet album? 
                      N'est-ce pas un peu abuser de la part de l'éditeur? 
                      Parce que, rappelons-le, l'idée vient de Dargaud 
                      à la base, pas de Van 
                      Hamme... (voir documentaire "XIII, 
                      les secrets d'une saga").
                    
Le moins que l'on puisse dire, c'est que cela a plutôt bien 
                      marché pour Dargaud: la couverture média a 
                      battu tous les records! Je ne pense pas qu'une chaîne 
                      de télévision ou qu'un journal ait oublié 
                      de parler de la sortie des deux derniers albums de XIII 
                      le 13 novembre.
Et bien sûr avec tout ça, les 
                      attentes des fans, des lecteurs de la première heure, 
                      montaient en flèche.
                    
Mais n'est-il pas dangereux d'en faire trop? 
                      Quand un scénariste tel que Jean Van Hamme décide 
                      d'abandonner l'une de ses séries phares, a-t-on vraiment 
                      besoin d'autant de publicité? Je n'en suis pas convaincu. 
                      Du moins pas si la série est censée s'arrêter. 
                      En tant que fan, je suis personnellement plutôt adepte 
                      d'un marketing léger voire subtil (le 1er challenge 
                      XIII experts par exemple) que d'un marketing de masse envahissant. 
                    
Mais 
                      bon, revenons à La 
                      version Irlandaise, 18e album de la série XIII: 
                      qu'en est-il donc de cet album? qu'apporte-t-il à 
                      la série? Comment s'intègre-t-il dans l'ensemble? 
                    
Tout d'abord, je dois dire que j'adore la 
                      couverture. Je la trouve très forte, très 
                      efficace, très belle.
                    
Je dois aussi avouer que je ne suis pas un 
                      immense connaisseur de Blueberry (j'en ai lu plusieurs et 
                      j'aime bien, mais n'en possède pas). J'espère 
                      que vous me pardonerez ce manque de culture.
                    
Maintenant, et je suis désolé 
                      d'insister, je dois dire que ça m'a fait super bizarre 
                      de lire un XIII dessiné par quelqu'un d'autre que 
                      Vance, aussi talentueux soit-il. Avec des dessins de Giraud 
                      tellement différents et un scénario qui se 
                      concentre plus sur l'histoire de l'Irlande que sur celle 
                      de notre héro préféré, il était 
                      difficile de croire que cet album était un XIII.
                    
Bien sûr, on y apprend qui de Jason 
                      ou Seamus est redescendu 
                      vivant de leur virée en montagne et est devenu XIII. 
                      Bien sûr, j'ai été agréablement 
                      surpris par l'intervention de Frank 
                      Giordino dans la genèse des aventures de XIII. 
                      Bien sûr, le scénario est bien construit et 
                      l’on n'a pas envie d'arrêter de lire avant la 
                      dernière case. Mais toujours est-il que je n'arrivais 
                      pas à me dire que c'était un album de XIII. 
                      Après tellement d'années, XIII et Vance sont 
                      indélébilement associés dans mon esprit. 
                      De même que Van Hamme doit en être le scénariste.
                    
Pour 
                      revenir à l'album à proprement parler, je 
                      pense que c'est une bonne BD, mais malheureusement, il n'apporte 
                      pas beaucoup à la série XIII (l'identité 
                      de XIII est également dévoilée dans 
                      Le dernier round). En fait, non, j'exagère: cet album 
                      garantit qu'on ne nous fera plus le coup du "ah, au 
                      fait, on t'avait menti. Tu n'es pas celui que tu crois être". 
                      Et c'est une bonne chose...
                    
Malgré tout, je trouve qu'il est difficile de considérer 
                      cet album comme faisant partie de l'ensemble. Par son histoire 
                      autant que par le fait qu'il soit dessiné par une 
                      "guest star". Un exemple frappant est le temps 
                      que met Jason a prononcé son premier mot: 25 pages! 
                      Et si l'on fait la somme des moments où il est présent, 
                      on doit être à maximum 20% de l'album...
                    
Bref, on en oublie que c'est un album de XIII 
                      et l’on se prend à vouloir connaître 
                      la suite des aventures de ce nouvel héro de bande 
                      dessinée: Seamus O'Neil. Mais non, on est subitement 
                      ramené à la réalité treizienne 
                      par l'apparition de Giordino et de Jessica. 
                      Et c'est là que tout commence à prendre forme.
                    
Parce qu'il faut bien l'admettre: Jean Van 
                      Hamme reste un tout grand du scénario et ce n'est 
                      pas un album supplémentaire sur commande qui va l'empêcher 
                      de trouver un moyen de nous accrocher et de donner un sens 
                      à tout ça. C'est donc avec l'arrivée 
                      de Giordino (et de son assistante/maîtresse Jessica) 
                      que La version Irlandaise devient un vrai album de XIII: 
                      suspens, plans diaboliquement tordus, rebondissements, révélations. 
                      Tout y est!
                    
J'ai particulièrement aimé comment 
                      Giordino s'adapte aux différentes situations, en 
                      se concentrant uniquement sur ce que cela peut lui apporter. 
                      Peu importe qui souffre, qui meurt, qui trompe qui, qui 
                      couche avec qui, qui trahit qui. L'essentiel, c'est qu'il 
                      sorte gagnant et en position de force.
                    
Et voilà comment on apprend que Giordino 
                      est responsable d'avoir envoyé le pauvre Jason à 
                      Cuba, point de départ de toutes les aventures de 
                      XIII.
                    
En conclusion, comme je le disais précédemment, 
                      Jean Van Hamme a réussi son coup, alors même 
                      que cela semblait mal engagé et que la pression était 
                      à son maximum. C'est d'ailleurs pour cela que j'ai 
                      de la peine à imaginer XIII sous la plume d'un autre. 
                      Pour moi, XIII est et sera toujours une BD par Jean Van 
                      Hamme et William Vance. Remplacer l'un des deux et XIII 
                      n'est plus vraiment XIII.
                    
Et c'est pour ça que, très franchement, 
                      je ne suis toujours pas convaincu par le concept de "guest 
                      star", aussi connu et talentueux soit-il... 
                    
Sylvain Cujean
                      Novembre 2007
                    
A lire également: l'analyse 
                      du dernier round, sorti au même moment que la 
                      version Irlandaise