"Lâchez les chiens" entrera dans
l'histoire des albums de XIII comme étant celui qui a été
lancé par un événement destiné aux
fans, aux vrais: le Challenge
Treize Experts était en effet une manière pour
Dargaud de
remercier les fans de la série. Plutôt que de s'attaquer
à l'ensemble des lecteurs, ce jeu nécessitait une
excellente connaissance de l'ensemble des albums. La finale
du 6 mars à Paris restera certainement gravée
dans les mémoires de tous les participants (ainsi que la
mienne). Opération séduction réussie donc
par l'éditeur.
Mais qu'en est-il de l'album? Tout d'abord le titre
et la couverture: personnellement, j'ai été déçu.
Le titre ne correspond pas vraiment à l'histoire de l'album
et laisse à penser que ce n'est que de l'action. Quant
à la couverture, je trouve le visage de XIII raté.
Par contre, je dois admettre que Jessica ne me laisse pas de marbre
;-)
Bon, j'arrête avec les détails et m'attaque
au concret: l'histoire.
Même si le début de l'album est essentiellement
de l'action (décidément, on a de la peine à
en sortir), assez rapidement, les choses s'améliorent:
on assiste à une relation ambiguë entre Jessica
et XIII. Mélange de
haine et d'amour, on n'est jamais certain de savoir comment l'un
ou l'autre va réagir à telle ou telle situation.
Ce
genre de relation me fait beaucoup penser à celles qu'entretient
James Bond avec les espionnes russes... c'est d'ailleurs étrange
de voir XIII devenir subitement un homme à femmes, alors
qu'il semblait s'en désintéresser complètement
dans les premiers albums.
Les révélations de Jessica concernant
l'identité de XIII ne sont qu'à moitié convaincantes.
On se demande si Jean Van Hamme
ne se laisse pas une porte de sortie. Parce que les infos que
Jessica donne, viennent d'un dossier secret (on a pris l'habitude
de ne plus croire les dossiers) et qu'il reste des zones floues
(pas de photo, etc.). Cependant, les arguments qu'elle avance
sont plausibles. Bref, on est encore un peu plus dans le doute...
comme d'habitude.
Personnellement, je regrette vraiment que Jones,
Amos, Carrington,
Betty et Armand
n'aient que de petits rôles de figuration. On ne les voit
qu'à la fin de l'album et ils ne participent absolument
pas à l'histoire. Au vue de la fin de l'histoire, j'ai
bon espoir de les voir beaucoup plus présents dans les
prochains albums: le fait qu'ils se retrouvent tous en prison
risque de ressouder les liens entre eux. J'attends de voir ça
avec impatience.
L'absence (regrettable, je le répète)
de Jones profite largement à la nouvelle fille canon (rien
à voir avec sa profession :) Jessica (Jessie pour les intimes).
Wance semble se faire plaisir (ainsi qu'à nous, les mâles)
en nous montrant la quasi-totalité de son anatomie. Tous
les prétextes sont bons: changement de tenue dans le train,
séchage des habits au bord de la rivière, douche
au motel. Jean Van Hamme a dû se décider à
séduire le public masculin (qui doit représenter
déjà 95% des lecteurs) en lui donnant quelques images
croustillantes à se mettre sous la dent.
Afin de rendre crédible cette relation XIII-Jessica,
le scénariste fait disparaître Jones de l'histoire
et transforme XIII en homme à femmes. Ce dernier n'a en
effet plus aucun remord à coucher avec tout ce qui bouge,
même s'il sait que Jones l'attend, seule, au San Miguel.
Et moi qui prenais XIII pour quelqu'un d'irréprochable
;-) Ses retrouvailles avec Maria
en sont un autre exemple: Jones survient alors que XIII est sur
le point d'embrasser celle qui a peut-être été
sa femme. Dernier détail: XIII et Jones ne s'adressent
pas la parole de tout l'album et les seuls et uniques mots qui
sont prononcés par Jones sont "Oh pardon" quand
elle le surprend avec Maria... où sont passés son
sens de la répartie, son humour cynique et sa force de
caractère? S'il vous plaît monsieur Van Hamme, rendez-nous
la Jones des premiers albums!
Dernier point important de Lâchez les chiens:
le rôle de Giordino.
Il prend donc effectivement le rôle du méchant qui
s'acharne. Il lance systématiquement des tueurs aux trousses
de XIII et n'hésite pas à faire éliminer
tous ceux qui pourraient le ralentir (Spike,
les policiers de l'hélicoptère, etc.). Il manipule
le général Wittaker
afin de s'assurer le soutien de l'armée et n'hésite
pas à sacrifier Jessica (qu'il a pourtant mis dans son
lit). Etant donné sa position de chef de la NSA, il est
puissant, politiquement fort et a de nombreuses relations jusqu'au
sommet de l'Etat. Ajoutez à cela le fait qu'il soit rancunier
et sans pitié et vous obtenez le méchant idéal...
Quant à Irina, on ne
la voit pas, ni elle ni son organisation Executor (et personnellement,
je ne m'en plains pas: je trouvais tout ça pas très
crédible). On ne peut cependant pas la rayer définitivement,
le risque qu'elle ressurgisse étant élevé.
Le
fait que le groupe du jugement se reforme au Costa Verde nous
promet un prochain album intéressant avec de nombreux points
à régler: la recherche de Mullway, le trésor
des Irlandais, l'élimination de Giordino (comme XIII le
lui promet), la recherche de la véritable identité
de XIII et, au passage, la mise au clair de sa vie sentimentale
(Jones et Jessica risquent de ne pas vouloir le lâcher et
si on ajoute à ça Maria qui semble ne pas rester
insensible à son charme, on va vers de belles explications).
Alors, faites vite messieurs Van Hamme et Wance.
Ne nous faites pas attendre trop longtemps avant le prochain album...
Sylvain Cujean
16 mars 2002